A l’heure où les robots au cinéma et à la télévision sont de plus en plus souvent créés en images de synthèse ou a contrario par des acteurs, le réalisateur Koji Fukada fait dans son film Sayonara – au cinéma depuis le 10 mai – un choix radicalement différent. Le film raconte la relation entre une jeune femme, Tania, et son robot, Leona, dans un Japon irradié suite à des attaques nucléaires sur ses centrales. Elles assistent toutes les deux, patientes et résignées, à la fin d’un monde. Le réalisateur a confié le rôle du robot à un véritable Androïde anthropomorphe, développé par le professeur Hiroshi Ishiguro d’Osaka, baptisé le Geminoid F. Koji Fukada a découvert le robot dans une pièce du dramaturge Oriza Hirata dont Sayonara est l’extension cinématographique.
« Il est difficile de résumer mon excitation lors de la découverte de la pièce. Il y avait la stupéfaction de voir jouer sur une même scène, un androïde et une comédienne, un dispositif inédit dans l’histoire du théâtre. Bien entendu, ce qui m’intéresse dans la machine du Geminoid F, c’est qu’elle est le reflet presque parfait de l’homme et qu’elle incarne en cela notre désir, toujours reformulé par l’art ou la science, d’éloigner le seuil de la mort. » explique le réalisateur. Le film est ainsi poussé par une réflexion sur l’intelligence artificielle qui sera peut-être le dernier témoin du monde façonné par les hommes.
Ishiguro, cet explorateur de l’androgénie
Depuis 10 ans, Hiroshi Ishiguro crée une lignée d’androïdes de plus en plus réalistes, insistant sur la qualité du rendu des peaux, des mouvements des articulations et des expressions du visage. Sous la peau en silicone du robot se trouvent des dizaines de micro-moteurs qui visent à s’approcher des mouvements humains. Cet hyper-réalisme est pour Hiroshi Ishiguro une approche spéculaire de la robotique visant, non pas à imiter, mais à mieux comprendre le propre de notre humanité.
« Ces robots peuvent être un outil pour comprendre les humains. En sciences cognitives, par exemple : quel rôle a le mouvement des yeux dans une conversation ? Les robots peuvent nous aider à le comprendre, en activant ou en désactivant cette fonction pour des expériences. » déclare-t-il au festival SXSW lors d’une présentation (Le Monde, 17 mars 2016).
Ishiguro est allé jusqu’à créer un androïde à son image, Geminoid HI-1, qui le représente lors de conférences ou de présentations à l’étranger. Il est convaincu que d’ici cinq ans les robots offriront des solutions pour lutter contre la solitude ou inter-agir avec des patients autistes.
Le Geminoid F présent dans Sayonara est l’un de ses androïdes les plus développés. Après le théâtre d’Oriza Hirata, Sayonara est la deuxième intrusion de la créature d’Ishiguro dans le domaine artistique.
Cet article Sayonara : les androïdes d’Ishiguro au cinéma est apparu en premier sur Humanoïdes.